Tribunes

Jean-Charles Naouri, "retailer of the year" (or the decade)

LES FAITS. Jean-Charles Naouri vient d’être désigné «retailer of the year» par le magazine international Institutional Investor. Le classement a été établi à partir des votes de 2 300 gestionnaires de portefeuilles en Europe.
L’Histoire offre parfois d’extraordinaires retournements de situation. L’histoire commerciale aussi. En 1997, alors qu’il prend le contrôle de Casino à la faveur d’un mariage avec Rallye, Jean-Charles Naouri est, pour nombre d’observateurs, un habile stratège que le commerce passionne bien moins que l’ingénierie financière. 15 ans plus tard, le voilà donc désigné distributeur de l’année. Les 2 300 gestionnaires de portefeuille interrogés saluent visiblement les performances d’un groupe qui a démontrer sa capacité à… ne pas les surprendre sur ses résultats. Oh !, certes, pour qui ne regarde que la dynamique commerciale des Géant Casino, ce titre très honorifique en paraîtrait quasiment incompréhensible. Pourtant, Jean-Charles Naouri mérite mieux encore. Quitte à surprendre, distributeur de la décennie, «retailer of the decade», serait sans doute plus approprié.
La vision du lien off-line / on-line
Depuis 10 ans en effet, le boss de Casino voit plus juste que la moyenne de ses alter-ego. Bien plus juste. Car il fallait y voir clair, en 2000, pour déceler derrière l’enthousiasme potache des frères Charles (les fondateurs du site) tout le potentiel de Cdiscount. Le potentiel intrinsèque de l’entreprise mais, surtout, la perspective des passerelles à tisser à terme entre off-line et on-line. Résultat, à l’heure où Auchan et Carrefour doivent concéder un fort recul de leur activité non-alimentaire, Casino annonce un solde positif de son non-al : + 2,6 % en 2011. Négatif en hypers il est vrai mais terriblement positif on-line : + 14 %. Conséquence : avec plus d’un         milliard d’euros de ventes électroniques, Casino est l’incontestable leader du e-commerce et s’appuie, au passage, sur son réseau de magasins comme autant de points de contacts.
Autre pari de Jean-Charles Naouri dans le courant de la décennie : l’incroyable sacrifice des mètres carrés. Alors que le dogme historique du commerce privilégie la surface commerciale, il décide – le premier – de «rétrécir» ses hypers pour muscler les galeries commerciales attenantes.        A l’évidence, les performances commerciales décevantes des Géant sur le non-alimentaire ont forcé la décision. Mais ce qui n’aurait pu être qu’une réaction tactique à une situation est devenue une stratégie par la force de la vision. Sans le dire aussi ouvertement, Jean-Charles Naouri anticipe un paysage commercial où l’hyper, toujours présent, n’a plus la même puissance. Là encore, c’est la faiblesse de son propre actif qui l’a rendu plus lucide que ses concurrents. Au point d’ailleurs d’engager avant les autres ce qui s’imposera peu à peu à tous : la valorisation du «frais trad» qui, après le non-al dans les années 1980/90, deviendra probablement l’aspérité dominante de l’hyper des années futures.
Désengagement partiel
de l’immobilier
Dernière initiative en date : le désengagement partiel de Mercialys, l’activité immobilière du groupe.     A terme, Casino en demeurera certes le premier actionnaire mais n’en possèdera plus que 30 à 40 %. Une annonce qui a surpris nombre d’analystes, qui y ont d’abord vu un moyen de réduire l’endettement du groupe. Peut-être…  Mais, à nouveau, Jean-Charles Naouri n’aurait-il pas vu avant les autres les menaces qui pèsent sur la valorisation de l’immobilier commercial ? Possible. Car chaque euro dépensé on-line ne rémunère plus (et par principe) un mètre carré commercial off-line. Ce qui, à long terme, ne peut que pénaliser la valeur de l’immobilier. Une approche certes financière mais qui s’appuie d’abord sur une vision… commerciale à long terme.
Olivier Dauvers

TGC107LES FAITS. Jean-Charles Naouri vient d’être désigné «retailer of the year» par le magazine international Institutional Investor. Le classement a été établi à partir des votes de 2 300 gestionnaires de portefeuilles en Europe.

L’Histoire offre parfois d’extraordinaires retournements de situation. L’histoire commerciale aussi. En 1997, alors qu’il prend le contrôle de Casino à la faveur d’un mariage avec Rallye, Jean-Charles Naouri est, pour nombre d’observateurs, un habile stratège que le commerce passionne bien moins que l’ingénierie financière. 15 ans plus tard, le voilà donc désigné distributeur de l’année. Les 2 300 gestionnaires de portefeuille interrogés saluent visiblement les performances d’un groupe qui a démontrer sa capacité à… ne pas les surprendre sur ses résultats. Oh !, certes, pour qui ne regarde que la dynamique commerciale des Géant Casino, ce titre très honorifique en paraîtrait quasiment incompréhensible. Pourtant, Jean-Charles Naouri mérite mieux encore. Quitte à surprendre, distributeur de la décennie, «retailer of the decade», serait sans doute plus approprié.

La vision du lien off-line / on-line

Depuis 10 ans en effet, le boss de Casino voit plus juste que la moyenne de ses alter-ego. Bien plus juste. Car il fallait y voir clair, en 2000, pour déceler derrière l’enthousiasme potache des frères Charles (les fondateurs du site) tout le potentiel de Cdiscount. Le potentiel intrinsèque de l’entreprise mais, surtout, la perspective des passerelles à tisser à terme entre off-line et on-line. Résultat, à l’heure où Auchan et Carrefour doivent concéder un fort recul de leur activité non-alimentaire, Casino annonce un solde positif de son non-al : + 2,6 % en 2011. Négatif en hypers il est vrai mais terriblement positif on-line : + 14 %. Conséquence : avec plus d’un milliard d’euros de ventes électroniques, Casino est l’incontestable leader du e-commerce et s’appuie, au passage, sur son réseau de magasins comme autant de points de contacts.

Autre pari de Jean-Charles Naouri dans le courant de la décennie : l’incroyable sacrifice des mètres carrés. Alors que le dogme historique du commerce privilégie la surface commerciale, il décide – le premier – de «rétrécir» ses hypers pour muscler les galeries commerciales attenantes. A l’évidence, les performances commerciales décevantes des Géant sur le non-alimentaire ont forcé la décision. Mais ce qui n’aurait pu être qu’une réaction tactique à une situation est devenue une stratégie par la force de la vision. Sans le dire aussi ouvertement, Jean-Charles Naouri anticipe un paysage commercial où l’hyper, toujours présent, n’a plus la même puissance. Là encore, c’est la faiblesse de son propre actif qui l’a rendu plus lucide que ses concurrents. Au point d’ailleurs d’engager avant les autres ce qui s’imposera peu à peu à tous : la valorisation du «frais trad» qui, après le non-al dans les années 1980/90, deviendra probablement l’aspérité dominante de l’hyper des années futures.

Désengagement partiel de l’immobilier

Dernière initiative en date : le désengagement partiel de Mercialys, l’activité immobilière du groupe.     A terme, Casino en demeurera certes le premier actionnaire mais n’en possèdera plus que 30 à 40 %. Une annonce qui a surpris nombre d’analystes, qui y ont d’abord vu un moyen de réduire l’endettement du groupe. Peut-être…  Mais, à nouveau, Jean-Charles Naouri n’aurait-il pas vu avant les autres les menaces qui pèsent sur la valorisation de l’immobilier commercial ? Possible. Car chaque euro dépensé on-line ne rémunère plus (et par principe) un mètre carré commercial off-line. Ce qui, à long terme, ne peut que pénaliser la valeur de l’immobilier. Une approche certes financière mais qui s’appuie d’abord sur une vision… commerciale à long terme.

Olivier Dauvers

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