À la une

Petit message (personnel) à l'Autorité de la Concurrence…

L’interview que j’ai accordée à Libé hier sur le dossier Casino-Monoprix a visiblement fait grincer quelques dents du côté des sages de l’Autorité de la Concurrence, au point d’exiger de Libé la publication d’un droit de réponse. A dire vrai, peu m’importe. Je suis tellement attaché à ma liberté de pensée que je vais même persister et signer. Oui, je considère que Casino sort largement gagnant de cette opération : 55 magasins à vendre, des petites surfaces à chaque fois (Franprix, Monop), contre 100 % de Monoprix, il y a quand même une forme d’évidence ! Oui, il y a donc un grand écart entre les “doutes sérieux” sur le niveau de concurrence à Paris évoqué par l’Autorité il y a quelques mois encore et le niveau de concessions demandées à Casino. C’est pas rien en sémantique des “doutes sérieux“, non ? Pointer l’écart entre l’avis initial et l’accord finalisé est sans doute trop incorrect ! Il m’empêche : de mon point de vue, l’écart existe. Au passage, tant mieux pour Casino et bravo à ceux qui étaient aux manettes : ils ont bien oeuvré 😉 Enfin, je maintiens de faire le lien avec la précédente “grosse opération” dans le retail : la fusion Carrefour-Promodès. Certes, il ne m’a pas échappé que l’Autorité de la Concurrence n’existait pas dans sa forme actuelle (merci de me prendre pour un perdreau de l’année M. Lasserre !), mais la fusion Carrefour-Promodès était bien passée devant le “Conseil de la Concurrence” dont l’avis avait été très très largement suivi par le Ministre de l’Economie de l’époque. Carrefour avait dû se séparer de 34 magasins, dont la moitié appartenait à des franchisés. Pas de quoi fouetter un chat ni remettre en cause une opération stratégique. Exactement comme dans le cas Casino-Monoprix… Relativiser la portée de la décision déplait visiblement. Comme il ne me déplait pas de déplaire, j’assume donc.

NB  : sur les conséquences de l’avis, je laisse chacun à son jugement. Je cite juste le droit de réponse : “Ces cessions représenteront donc, pour les groupes concurrents, une opportunité exceptionnelle d’entrée à Paris […] Pour les consommateurs parisiens, la mise en œuvre des engagements de Casino permettra un accroissement sans précédent de la diversité de l’offre alimentaire à laquelle ils ont accès“. J’ai quand même hâte de voir tout ça. Et surtout les effets réels sur le marché. Amis Parisiens, j’ai quand même peur que Paris demeure 20 % plus cher que la moyenne !

5 commentaires

  1. Moi qui gère un vival dans le sud, je peux vous assurer une chose, ce n’est pas avec un groupe comme celui ci que les prix vont s’améliorer, surtout dans la proximité.
    Vous croyez qu’il y aurait eu une baisse de prix massive, sur leur format hyper, si leurs comptes n’auraient pas était dans le rouge ? (au niveau national).
    Pour moi ce sont des voleurs, je vous enverrais, Olivier, leurs nouveaux fichiers prix concept Vival (début d’année), avec a la clef la baisse de prix répercuter sur les franchisés.

  2. D’autant plus qu’à mon bon souvenir un des axes de stratégie de Franprix dévoilé fin 2012 était de se séparer de certains magasins franchisés qui ne respectaient pas une certaine image de l’enseigne (i.e. qui n’investissaient pas suffisament dans leur magasin), ce afin d’homogénéiser le parc…
    tiens tiens j’aimerais donc bien voir quels seront ces 55 magasins…

  3. Cher Olivier,
    Je tenais à vous féliciter pour votre analyse très pertinente, comme bien souvent d’ailleurs. J’ai moi même été impliqué dans le contrôle des concentrations et je sais bien comment cela se passe dans la réalité. Il est tout à fait exact qu’il y a un décalage entre l’analyse concurrentielle de l’autorité de la concurrence (les fameux doutes) et les remèdes qui sont demandés pour les résoudre. Comme le dit FR plus haut, bien souvent les magasins sacrifiés sont l’occasion pour un groupe de se débarrasser des unités qu’il comptait céder. Ainsi, la décision de l”autorité de la concurrence permet de faire passer en interne des décisions qui auraient été difficiles à faire accepter sinon. Comme vous le dites par ailleurs, c’est exactement ce qu’il s’est passé lors de la concentration Carrefour/Promodes où Carrefour a profité du contrôle pour se débarrasser des magasins difficiles (magasins situés en zone sensible, magasins au trafic faible…). A l’époque, le contrôle qui avait été fait avait été une véritable aubaine pour Carrefour. Ceci dit, je ne suis même pas persuadé de la mauvaise foie de Monsieur Laserre. Il n’a tout simplement jamais mis les pieds dans un supermarché et est prêt à avaler toutes les salades que lui racontent les distributeurs (il n’y a pas de jugement de valeur contre les distributeurs là-dedans, il est normal qu’ils se défendent). Conclusion : les autorités de concurrence ne font pas leur travail de manière assez sérieuse et rigoureuse et c’est tout à fait faux de prétendre que le marché de détail parisien va connaître une concurrence accrue.

  4. C’est clair Casino s’en sort drolement bien dans cette opération! Il a su faire valoir ses arguments:
    – La concurrence à Paris ne peut s’appréhender que quartier par quartier car on parle là de supermarchés de proximité voire de supérettes (la zone de chalandise est étroite) et Franprix Casino Monoprix sont rarement en monopole dans un quartier.
    – La position “dominante” de Casino s’est construite en plus de 25 ans sans que personne n’y trouve à y redire. Les habitants étaient bien content de voir des supermarchés s’intaller en centre ville plutot que de devoir aller en périphérie faire ses courses dans un hyper. Et Casino et ses enseignes étaient bien les seules à se positionner sur ces formats jusqu’à il y’a quelques années. Les Carrefour contact, A2pas, U Express se sont interressés à Paris bien tard; et certains sont notoirement absents et ce n’est pas un hasard: Leclerc, Intermarché …
    – Le modèle d’exploitation d’un super urbain n’a rien à voir avec avec celle d’un super ou hyper en campagne ou en périphérie. Contraintes commerciales, logistiques, couts de l’immobilier…
    On ne peut pas comparer le Casino de la place de la place de la Nation, Le Monoprix des champs élysées avec un Carrefour entre 2 autoroutes ou un Leclerc en ZAC au milieu des champs…
    L’argument de Casino serait qu’en terme de couts et de prix il “subit” plus son modèle qu’il n’en profite (cf son taux de marge).
    -Autres arguments: ces enseignes sont opérationnellement et commercialement indépendantes; Monoprix n’est pas qu’une enseigne alimentaire (poids significatif du textile; équipement dans le CA); présence d’autres formats qui rentrent en concurrence: nombreux hypermarchés en périphérie (Carrefours, Auchan); Sites de livraisons à domicile en développement; Picard, Marchés et petits commerces encore forts…
    Cet argumentaire bien ficelé aura su probablement convaincre l’autorité qu’il n’y a pas péril dans la demeure. comme Carrefour l’a fait valoir lors de sa fusion avec Promodes et qui lui vaut d’être aujourd’hui derrière Leclerc 😉

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page