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Gilets jaunes : qui osera leur dire… ?

TGC 181 bloc

LES FAITS.  Depuis trois semaines, la France vit au rythme des gilets jaunes. A l’origine simple contestation sur le prix des carburants, le mouvement traduit à présent un mal-vivre bien plus large. Et notamment d’une relation trop contrainte à la consommation. 

 

Dans les rues, les “gilets jaunes” sont minoritaires. Très minoritaires.  Quelques dizaines de milliers tout au plus. Mais, dans l’opinion, ils sont largement majoritaires. Selon Viavoice pour Libération, 53 % des Français disent soutenir le mouvement et 31 % le comprennent sans pour autant le soutenir.Autant dire que l’ancrage populaire de la fronde dépasse largement le cadre d’une seule catégorie de Français. Et que, finalement, seuls ou presque, ceux qui sont sans souci quotidien ne s’inscrivent pas dans la grogne.

A l’origine simple contestation sur l’envolée des prix à la pompe (effacée par la baisse depuis) et la fiscalité, le phénomène traduit désormais bien davantage : un mal-vivre économique. Du réservoir à la caisse des supermarchés, la contrainte financière est partout. Et surtout permanente. La cause est connue : la “crise”. Le symptôme identifié : le pouvoir d’achat. Or, à l’exception d’un frange réelle mais heureusement minoritaire de la population, ni l’un ni l’autre ne sont la racine sérieuse de la souffrance. Hélas lorsqu’un problème est mal posé, la solution n’en est que plus difficile à trouver. Reste à savoir quel “politique”, par effort de pédagogie plutôt que par facilité de démagogie osera l’exposer clairement. 

Pouvoir d’achat stable

Non !, le pouvoir d’achat ne baisse pas. 2018 sera même la cinquième année consécutive de hausse. Il y avait certes eu, au préalable, trois années de baisse, selon l’INSEE. Mais acceptons l’idée que, depuis une dizaine d’années, le pouvoir d’achat est globalement stable. Bien sûr, derrière les moyennes, des disparités, parfois douloureuses. Ainsi, il est démontré que toute inflation sur le prix des carburants touche principalement les foyers les plus modestes. Mais, là encore, pour la majorité des Français, si le pouvoir d’achat est bien le mot exprimé, il n’est pas le mal avéré.

Le vouloir d’achat va croissant et continuera à aller croissant

Comme souvent, la perception diffère de la réalité car elle traduit autre chose. En matière de consommation, le “vouloir d’achat” insatisfait est la véritable cause de la souffrance par la frustration engendrée. Dans une approche sociologique, la pauvreté naît du renoncement à achat faute de ressource. Auquel cas, l’extrême majorité des Français sont… pauvres. Y compris donc par exemple un cadre émargeant à 3 000 € nets mensuels (tout sauf un salaire modeste) bavant devant un iPhone XS à 1 500 €. Lui aussi exprimera à sa manière une frustration de consommation. Car comment amputer la moitié de son salaire pour un objet (même intensément désiré) qui, de plus, sera rendu obsolète dans quelques mois par un autre, plus désiré encore ? 

Bien ou mal pour le consommateur : rien ne laisse escompter une inversion de tendance. Son vouloir d’achat ira croissant. Bien au-delà des seuls produits hi-tech, l’offre s’enrichit jour après jour. Et le marketing est si abouti que le désir croit avec… Sans compter que la transparence de nos vies connectées laisse entrevoir à chacun la vie de l’autre. Donc sa consommation. Ce qui, par ricochet, nourrit la frustration et le sentiment d’appauvrissement, même si la réalité froide, mathématique, statistique est différente. C’est cette pédagogie qui est nécessaire. Indispensable même. Qui osera… ?

Olivier Dauvers

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29 commentaires

  1. Bonjour
    autant je suis d’accord sur le problème du vouloir d’achat (et limiter un peu les pubs qui enlaidissent les villes, sont un supplice pour les oreilles à la radio et pour les yeux à la télé) ne ferait pas de mal… autant sur le pouvoir d’achat, les chiffres de l’insee ne font pas l’unanimité. J’ai lu récemment le livre de Philippe Herlin (Pouvoir d’achat le grand mensonge) qui remet en cause les calculs et c’est une approche vraiment intéressante. Je le conseille, c’est éclairant.

    1. Je partage la difficulté de lecture du pouvoir d’achat. C’est pour ça que je ne regarde que la version “par unité de consommation” et non globale. Et ensuite que je cherche pas à démontrer que le pouvoir d’achat progresse, juste qu’il est en gros stable. Ce qui est le cas, quel que soit le prisme par lequel vous prenez le point. Encore une fois pour la majorité des Français. Je ne minimise pas la frange de Français qui sont réellement dans la panade. Pas du tout. Mais c’est pas le gros des troupes.

  2. Vous n’avez certainement pas de problemes de fin de mois pour écrire ceci. Vous êtes la classe hors sol donneuse de leçon. Les clients, les ELS en souffrent. Et sans vouloir le dernier telephone.

    1. Je ne donne aucune leçon. J’analyse une situation. En totale liberté de penser. Et depuis bien plus longtemps que le mouvement dont vous remarquerez que je ne le conteste pas en tant que tel.

  3. Moi même ayant travaillé dans la GD quelques mois seulement chez But mais suffisant pour s’en faire une idée. Ma femme en fit autant quelques temps plus tard au Leclerc à Orly. Et ma belle soeur 20 ans à faire la crémière au Leclerc à Outreau, elle préfère son nouveau métier d’aide soignante, plus proche de chez elle. C’est dire … Ça c’est pour planter le décor.
    Que le gens fasse la gueule quand fin février 2016 le gasoil était à moins d’1 le litre et qu’il a atteint fin octobre 2018 plus d’1,50€. Quand on fait 20 000 km par an voire plus en province rien que pour aller bosser, forcément ça se ressent financièrement. D’autant qu’avec le 80km/h généralisé et le durcissement extrême du contrôle technique auto, ce n’est plus des couleuvres qu’il faut avaler mais des boas !
    La grande distribution dans sa grande générosité a vendu les carburants à prix coutant. Une perte sur des ventes taxées avec une TVA à 20% qui sera répercutée sur l’alimentaire avec un TVA à 5,5%. Répercussion que nous confirmera ou pas Olivier Dauvers avec ses relevés et observatoires.

  4. Tout à fait juste Olivier, vous parlez de l’IPhone, mais il faut y rajouter l’abonnement téléphonique, de plus dans la majorité des foyers est apparue une box, elle aussi avec abonnement et parfois TV, vidéo et musique également par abonnement. Une nouvelle ligne dans le budget qui pèse de plus en plus lourd. Cette ligne vient au détriment du pouvoir d’achat de tous les jours, ce qui donne cette impression de perte de pouvoir d’achat.

  5. C’est en janvier que le problème “réel” de pouvoir d’achat arrivera, quand les gens se prendront 5 à 10€ par panier toutes les semaines à cause des EGA. Et cela sera autrement plus visible que pour le plein d’essence (dont le prix a d’ailleurs baissé depuis mi novembre!).
    A voir aussi comment les enseignes traiteront leurs promos si report de la loi… les commande sont déjà bouclées pour le T1!

  6. L’économie c’est d’abord de la psychologie : peu importe les chiffres (d’ailleurs mêmes les indicateurs de l’INSEE peuvent être contestés). Trop de bienveillance visible pour les “gros” est visible par tous même les moins informés. Mais notons que ce qui n’est pas visible pèsent bien plus de milliards : le travail au noir, les patrons artisans et libéraux qui passent tout dans leur compta (équipement de la maison, plein de la voiture perso, travaux et j’en passe) réduisant ainsi leurs impôts et ne s’acquittant pas de la TVA. Bien pratique et juteux mais d’autres paient pour cette “évasion”. On n’en parle jamais.

    1. Tout à fait d’accord avec vous Lilian! l’évasion fiscale est abyssale!!! et en même temps…. le petit commerçant, n’arrive pas à se verser de salaire… entre le RSI qui vous tombe dessus alors que votre CA est en berne, taxe sur les enseignes, la sasem, taxe immobilière un an plus tard etc… arrivé en 2ème année le commerçant ferme boutique ou vivote. De ce fait il trouve des astuces pour rester en vie. c’est pas beau mais c’est la réalité.
      Après la solution la plus simple pour lui serait de se mettre au chômage pendant les 2 ans de droit, puis au final passer au RSA et avoir toutes les aides qu’il n’avait pas en trimant en étant commerçant et le comble…gagner moins…
      Je schématise à l’extrême mais en France on taxe ceux qui bossent pour financer ceux qui ne font rien.
      le travail ne se trouve pas toujours au bout du trottoir mais il y a énormément de postes vacants mais c’est l’envie qui manque pour y aller. et pourquoi aller chercher un travail au SMIC quand je suis si bien au chômage pour le même montant.
      Des erreur de parcours ou des situations de licenciement ça arrive et il faut aider les gens à remonter la pente c’est primordial mais il ne faut pas trop donner l’envie à aux ex-travailleurs à rester au chaud avec un montant qui ne les incitera pas à retourner travailler.
      Sur l’article d’Olivier je te rejoins à 100% toutes les catégories sont au final dans l’attente ou la frustration d’un bien qu’il ne peut avoir. Mais ça me fait doucement rire dans le fond car sans passer pour un vieux que je ne suis pas (encore), nous sommes tous des dépendants à tous ces nouveaux gadgets : téléphones, internet, abonnement musique, films. sur-consommation en tout genre etc… qui donne à la fin un déficit sur notre paie.
      Dernier point qui m’a toujours choqué quand on regarde aux infos, reportages toutes les personnes en difficultés; ils fument tous en majorité sans parlé de la boisson pour d’autres. à 10€ le paquet par jour pour bcp!!! il n’y a pas un problème de priorité qlq part?!
      Bref désolé je déborde…. Tout ça pour dire que oui les taxes augmentent tout le temps mais nous participons nous même à nous enliser avec tout nos faux besoins que nous avons autour de nous.

  7. Très bien. Il me manque dans l’analyse plusieurs effets néanmoins dont l’évasion fiscale en effet et un qui me semble vraiment primordial, ce sont les écarts de salaire. Même en gagnant 3000€ ou plus, on n’en reste pas moins effaré des salaires de certains dirigeants…

  8. Les ELS vont surtout souffrir de n’avoir aucune prime cette année du fait des magasins et entrepôts bloqués. Certains vont même finir au chômage. Quelle solution pour financer les indemnités des nouveaux chômeurs ? La hausse de l’essence, de la TVA?
    Je suis ELS depuis 20 ans
    Bravo Olivier pour cette tribune courageuse

  9. Une tribune courageuse, tant il est vrai qu’une bonne part du problème vient du fait que les pauvres aient accès à l’information et deviennent jaloux à cause d’internet, mais il manque quelques points à cette brillante analyse :
    – Les pauvres arrivent encore à économiser quelques centaines d’euros pour s’acheter des écrans plats c’est donc qu’on peut les taxer encore plus.
    – Il y a des millions d’emplois disponibles, chacun est responsable de sa situation il faut baisser le chômage, le rsa, les retraites, les remboursements de la sécu ….
    – La main invisible va systématique provoquer une allocation des ressources juste et égalitaire, en aucun cas provoquer une concentration des richesses version XIXème.
    – Jamais au grand jamais les élites, être supérieur autoproclamé, n’iraient planquer leur pognon dans des paradis fiscaux ou frauder les impôts : ils ruissellent.

  10. Vous avez raison sur le “mal-vivre” général comme cause de cette crise. On peut ajouter que tout s’accélère, nos vie changent rapidement. La “start-up nation” est prête mais les autres ?
    Les conditions de travail ne sont pas vers plus de progrès alors que les salaires n’augmentent pas. Pourquoi toujours aller plus vite ? Il serait bon de remettre un peu de “temps humain” dans nos vies et de soulager la pression, d’autant plus que la structure familiale n’est pas à la fête et que du côté de l’amour on est également dans le “vouloir d’achat” (si on peut dire).

  11. Bonjour, vous oubliez aussi Une chose importante dans vôtre analyse, vous parlez d’un cadre qui gagne 3000euros et vous dîtes que c’est loin d’être Modeste… Permettez moi de vous demander dans ce cas si vos calculs tiennent compte de la tranche d’imposition,des frais scolaires, de cantine, de garderie, d’activité Extra scolaires, de santé avec le coût des mutuelles obligatoires, des aides de la CAF notamment en cas de naissance, des heures réelles de travail et non ceux inscrit sur la fiche de paie car ces cadres dont vous parlez font pour la plupart 50 heures payées 39… Vous venez juste de parler de la tranche la plus imposée en France et bénéficiant du moins d’aides a tel point que tout cumulé et ramener au taux horaire Ils gagnent à peine plus que Les gens gagnant le SMIC. Faites Les comptes honnêtement svp .

  12. La démagogie du cadre intermédiaire qui est Riche face aux smicards… La vérité est que nous sommes tous dans le même bateau. La vraie vache à lait c’est Les classes moyennes. Ça la toujours été. Les gens à faibles revenus quand à eux ressentes la moindre augmentation comme une agression. L’argent est ailleurs et les gens l’ont compris, Ils veulent juste de l’équité et de la décence

  13. Visiblement vous n’avez pas enquêté chez les “vrais” pauvres dont j’ai fait partie il y a quelques années lorsque j’elevais seule mon enfant (pas de pension alimentaire, pas d’allocations familiales car 1 seul enfant, un petit salaire et des périodes de chômage technique). Être pauvre c’est se poser encore et toujours les mêmes questions : si je fais les courses avec les 30 € qui me restent le 20 du mois, je ne pourrai pas acheter les chaussures dont mon fils a urgemment besoin, je ne pourrai pas payer la sortie scolaire, …. des millions de femmes vivent comme cela, croyez moi le dernier iPhone est le cadet de leurs soucis. Je me permets de vous dire que vous faites injure à ces personnes

    1. Bjr
      non, je n’entends pas faire “injure” à ces personnes. Je reconnais même qu’il existe bien cette partie de la population qui galère au quotidien (je l’ai écrit dans cette tribune). je dis en revanche que 80 % de la population (la part de ceux qui soutiennent ou comprennent le mouvement gilets Jaunes) n’est pas dans cette situation. Ce qui justifie de réfléchir à la situation.

      1. Salaire moyen en France. Dans le secteur privé ou dans les entreprises publiques, le salaire brut moyen et de 2912 € et le salaire net moyen est de 2202 € (INSEE).

  14. FOLKLORE des “Bidochons Parisiens” comme si PARIS était la France, comme si La France pouvait donner des leçons au Monde ….
    M.DAUVERS vous avez tout FAUX !
    Culture limitée au Passé nantie d’un Tout Numérique et Digital Gratuit !
    Car le Futur n’est plus dans le “connecté” comme pas plus dans la Mondialisation = C’est Finie !
    Dés que le DIGITAL devra assumer ces contraintes financières, dés que le Pays France acceptera de taxer les GAFA la France sera réduite à faire comme la Chine fait depuis déjà un demi siécle = Investir dans des relations de Proximité avec une production Locale –
    Les “élites” dirigeants de la Production française qui ne produisent plus rien, méme pas le Basique, ne peuvent pas revendiquer une progression de la consommation, juste une progression de la DETTE ….
    Vous avez TOUT FAUX M. DAUVERS avec vos chiffres ( Regardez d’abord avant de les publier qui les donne…) les Informations publiées en France par les médias français sont au niveau de …. ZERO ….,
    sauf à n’étre qu’un perroquet des créateurs du déficit Français ….
    PJULIEN / dans la BaskAttitude = Devinette :
    “Savez-vous ce qui rend Heureux 1 Basque ??
    — C’est simple un Joli Cochon pour l’Hiver, et un Parisien pour l’été !
    — et quand c’est un Cadre Dirigeant d’entreprise Parisien c’est nos vacances à Bali !

    1. Merci de votre contribution qui, comme trop souvent, n’apporte rien de construit. Faites un effort ! J’adore avoir “faux” quand je comprends pourquoi parce que ça me rend plus intelligent. Si, si, je vous promets. Alors faites un effort 😉

  15. Ne pas confondre salaire et revenu disponible (salaire après impôts, cotisations, taxes, prestations sociales…) qui lui a BAISSE pour beaucoup de personnes ces 15 dernières années (retraités, classe moyenne…).
    Certaines dépenses sont également devenues quasiment obligatoires (internet, téléphones portables..) et des dépenses récurrentes ont également explosé (loyers ou achat immobilier, électricité, essence…).
    Il y a hélas beaucoup plus de perdants que vous ne semblez le dire…

  16. Bonjour Olivier,
    MERCI pour cet article courageux.
    Je vous rejoins dans l’état d’esprit sur tout le contenu, même si j’accepte l’idée que vous ayez des contradicteurs qui challengent vos chiffres (c’est le principe du débat).
    Il y a un élément sur lequel je n’arrivais pas à mettre un mot lorsque j’expliquais à mes amis pourquoi je ne soutiens pas le mouvement. Cet élément, vous l’avez parfaitement nommé : c’est la notion de vouloir d’achat.
    C’est elle qui me paraît centrale dans tous ces évènements, et qui est malheureusement complètement occultée !!!

  17. Oh la la la vie en rose
    Le rose qu’on nous propose
    D’avoir les quantités des choses
    Qui donnent envie d’autre chose
    Aïe, on nous fait croire
    Que le bonheur c’est d’avoir
    De l’avoir plein nos armoires
    Dérisions de nous dérisoires car…
    Alors ce n’est pas de l’analyse de haut niveau ça ? Je ne me souviens plus du nom de ce sociologue 🙂

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