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Les prix : ce ”boulet” que traîne Auchan…

Le prix est un sujet majeur de la relance d’Auchan. Les errements des années passées se paient cash encore ­aujourd’hui, malgré les efforts menés depuis un an. Avant d’aller (éventuellement) plus loin dans le discount, la ­direction du groupe observe les résultats d’un test mené discrètement dans les magasins repris à Casino. 
Les difficultés auxquelles doit faire face Auchan sont connues : moindre attractivité du format hyper, vieillissement des actifs, effondrement du non-al… Parmi elles, le prix est aussi un sacré caillou dans la chaussure du distributeur. À la fin de la décennie 2010, l’enseigne a laissé dériver ses étiquettes, aiguillonnée par un besoin de marges supplémentaires. Et ce qui était déjà une manœuvre dangereuse s’est révélé délétère dans la période inflationniste des années 2020. 


Le dérapage prix des hypermarchés Auchan en France est un vrai cas d’école, qui se décompose en trois temps. D’abord la période 2015-2019 : l’indice prix (mesuré en drive) augmente de façon régulière et l’image prix se dégrade ­modérément. C’est classique, les clients ne voient pas tous ni tout de suite que leur magasin est moins compétitif. Un foyer sur trois continue d’avoir une bonne opinion sur les prix des hypers de l’enseigne. 
Durant la séquence 2020-2023, Auchan se maintient dans une fourchette d’indice entre 101 et 102. Un niveau difficile à assumer pour de grands hypers, et une ”constance” dans le temps qui permet à un plus grand nombre de clients de réaliser le mauvais positionnement de l’enseigne. Dans le contexte inflationniste de l’époque, l’effet est terrible. En janvier 2024, l’image prix a ainsi perdu près de 11 points par rapport à 2015 ! La part de marché des hypers Auchan a reculé de plus de 2 points sur la même période (les explications, ici, sont évidemment multiples). 
En 2024, le distributeur se résout à revenir dans le match des prix. L’indice des hypers repasse sous la barre des 99. Mais le phénomène est bien connu : les clients mettent encore plus longtemps à remarquer des baisses qu’à s’alarmer des hausses. Surtout, le timing est catastrophique. Les Français ne se remettent pas de l’inflation inédite qu’ils ont subie en 2022 et 2023 : autant dire que les efforts de repositionnement passent largement inaperçus alors… qu’ils coûtent cher !
Au lieu de remonter, l’image prix des hypermarchés Auchan perd encore un point durant l’année 2024. Le modeste gain de part de marché, lui, n’est dû qu’à l’intégration des magasins rachetés à Casino. Des magasins qui vont ­d’ailleurs donner une idée à Auchan…
Le distributeur sait qu’il devra serrer ses marges dans la durée s’il veut marquer les esprits des clients. Il craint aussi de devoir encore remettre au pot si l’indice prix à 99 de ses hypermarchés se révèle finalement insuffisant. Mais selon ses propres calculs (présentés en interne), chaque point de baisse de prix lui coûterait 60 millions d’euros. Il a déjà engagé 62 M€ en 2024 : impossible à reproduire dans le contexte actuel.
En attendant de tirer les fruits d’un programme supplémentaire d’économies (dont un plan social en cours), Auchan a profité de la ­réouverture des anciens Casino pour expérimenter avec eux un positionnement prix plus agressif. Sur la base des tarifs relevés en drive, ainsi, l’indice des ex-Géant ressort environ deux points en dessous de la moyenne nationale des hypers Auchan ”historiques”, de façon constante depuis les changements d’enseigne en mai et juin derniers. 

L’effet direct de ce niveau de prix est évidemment difficile à évaluer de façon isolée, étant donné la configuration atypique des points de vente choisis. Des magasins depuis longtemps désertés par les clients, aux actifs rincés et qui n’ont pas fait l’objet de vraies rénovations aux standards de l’enseigne Auchan. 
Les premiers résultats partagés en interne (et révélés il y a quelques semaines par La Lettre) font état d’un chiffre d’affaires 8 % supérieur au prévisionnel. La marge brute est plus faible qu’attendu en pourcentage (20,5 % du CA). En ”masse de marge”, il manque une bonne dizaine de millions d’euros dans les caisses d’Auchan, par rapport à ce qui était prévu. Quelles conclusions le ­distributeur tirera-t-il de ces résultats ? Réponse dans le courant de l’année. 

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