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Le ministre, l’épicier, le client et le paysan

TGCLES FAITS.  Via son compte Twitter, Stéphane Travert, le ministre de l’Agriculture s’en est pris en fin de semaine dernière à une publicité Leclerc, laquelle mettait en doute à la fois l’intérêt et l’efficacité de la loi EGA pour la cause qu’elle entend servir : le revenu agricole. 

 

Qu’un ministre de l’Agriculture s’en prenne aussi ouvertement à Michel-Edouard Leclerc est presque banal. Qu’il le fasse avec les armes habituelles de l’épicier (la provocation publique) est une première. Et, au moins dans la démarche de communication, c’est une réussite. A Leclerc qui affirme, le ministre répond “non”, “non” et “non”. Trois fois “non”, au crayon rouge, sur une affiche raturée et barrée d’un “#Fake News”. Le tout largement diffusé et relayé via les réseaux sociaux.

Depuis l’origine, le ministre a son idée, sa théorie : le ruissellement

D’évidence, chacun est dans son rôle. L’épicier, côté client ; le ministre, côté paysan. Mais à une nuance près… L’un et l’autre n’ont pas le même droit à l’erreur dans l’analyse. Pas un client n’ira chercher querelle à Leclerc si, d’aventure, la valse des étiquettes est plus modeste que suggérée (car, de fait, les prix n’augmenteront pas de 10 % comme le laisse à penser “l’accroche” de l’affiche). En revanche, tous les paysans attendent Stéphane Travert au tournant sur leur revenu.

Depuis l’origine, le ministre a son idée. Sa théorie, plutôt : le ruissellement. Les marges nouvelles accordées au commerce (donc les hausses de prix, faudrait quand même pas prendre les clients pour des perdreaux de l’année) doivent remonter les filières (avec leurs petits bras musclés ?) pour finir dans la poche des paysans. Voilà déjà pourquoi Leclerc ne met en avant dans sa communication de contestation que des produits sans aucune valeur ajoutée agricole française : des pâtes…  italiennes, du café, du chocolat, du jus d’orange des Amériques ou de l’eau minérale, bien française elle, mais qu’aucun paysan ne produit ! Mais le ministre n’en a cure. Droit dans ses bottes, il développe à l’envi sa théorie. Encore récemment à Ouest-France : “Nous cherchons tout bonnement à rééquilibrer les marges“. Et Stéphane Travert d’expliquer “faire le pari que ces marges retrouvées dans la grande distribution ne généreront pas de surcoût pour les consommateurs mais retourneront vers les agriculteurs et les industriels de l’agroalimentaire”. Par quel mécanisme ? Quel levier ? Quelle obligation ? Personne – y compris dans les soutiens syndicaux de la loi EGA – n’y voit goutte. Sur le sujet, tous sont… secs. Un brin cruel pour une théorie dite du ruissellement. Qui pourrait bien être rapidement détournée en “fake”. Et faire du ministre chantre du ruissellement un… arroseur arrosé. 

Olivier Dauvers

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